"Je crois que ce qui est important, c'est d'être bien ensemble. De vivre ensemble et de partager des activités communes, des valeurs communes. C'est bien plus important que la différence d'âge." Annick a 14 ans d'écart avec son amoureux Jean-Pierre, qui est plus jeune qu'elle : "je pense qu'au moment du coup de foudre, la question ne s'est pas posée". C'était 1989 : "je crois qu'on était en train de faire notre petite révolution", s'amuse Jean-Pierre. Libres ni l'un ni l'autre, ils ont attendu avant de vivre librement leur histoire. Avec le recul, Annick estime que l'épreuve a renforcé leur relation : "ça a été vraiment le ciment de notre couple".
Karine Boutin, psychanalyste, rappelle que "dans l'absolu, dans l'amour, il n'y a pas de norme. On fait comme on veut du moment qu'on est heureux". L'amour bouscule tout sur son passage et personne n'a le mode d'emploi. Que cherche-t-on dans l'amour ? "Certains vont chercher une part d'eux-mêmes, certains vont essayer de trouver ce qu'ils n'ont jamais su se donner ou ce qu'ils n'ont jamais reçu. D'autres vont essayer de trouver un équilibre. D'autres vont vouloir juste donner, sans pour autant attendre quelque chose d'égal en retour."
Claude a 25 ans de plus que son conjoint et cette différence d'âge n'a jamais éte un problème. "Nous sommes un couple comme les autres.". Il n'y a pas eu de coup de foudre : "Je tenais un restaurant à Val d'Isère avec mon ex-mari et Laurent sortait du service militaire, il avait 20 ans et il est venu chercher du travail. Son frère était déjà dans mon entreprise, donc on l'a embauché. Quand il est rentré, je n'ai pas du tout fait attention à lui. Mon mari m'a dit : "T'as vu comme il est mignon celui-là ?" Après, avec mon ex-mari, les choses se sont gâtées. Nous nous sommes séparés et j'ai pris l'habitude de sortir un peu avec mon personnel quand on fermait le restaurant. On sortait en boîte, nous nous sommes rapprochés. Nous avons vécu cinq ans avant de prendre la décision de nous marier." Sa belle-mère a mis un peu de temps avant d'accepter leur relation.
"Vous ne pourrez pas avoir d'enfants"
Christophe a eu du mal à faire accepter son union avec sa femme. Il a sept ans de moins qu'elle. Ses parents n'ont pas compris : "cela ne correspondait pas aux critères en fait de ce qu'ils attendaient d'une femme pour moi". Parmi les arguments, la différence d'âge, mais aussi "le fait qu'elle ait déjà des enfants, le fait qu'elle ait un métier plutôt d'homme, elle avait une entreprise. Il y a même eu des choses du genre : "vous ne pourrez pas avoir d'enfants" ou des choses comme ça". Karine Boutin y voit le poids des injonctions sociales très présentes pour certaines générations. "N'oublions jamais que lorsqu'il y a de la différence, quelle qu'elle soit : différence d'âge, de sexe, de genre, de sexualité à proprement parler, de milieu social, à un moment donné, elle sera pointée du doigt, s'il y a un problème."
Karine Boutin constate que "la famille est souvent un phénomène bloquant. On craint le regard de la famille, des parents, de nos propres enfants quand on doit se séparer de son conjoint. Dans ces cas-là, le plus important, c'est notre propre bonheur". Un long chemin, parfois incompris. "N'oubliez jamais que si vous êtes malheureux, vous n'aurez pas des enfants très heureux."
Jean-Marc a fait connaissance avec sa compagne à travers les réseaux sociaux. Il devient vite accro à ses messages : "j'en étais au point de me lever la nuit pour regarder si elle m'avait pas écrit un truc à 23 h chaque nuit à 1 h du matin. Je me suis senti comme un gamin de quinze ans quand je recevais ses messages". Leurs onze ans d'écart n'a pas joué dans leur relation, même s'il reconnait un petit pincement au cœur quand il doit annoncer son âge.
"Ils voient que leur maman est beaucoup plus heureuse"
Cédric a 20 ans de moins que sa compagne. Ils ont attendu tous les deux d'être séparés pour se lancer dans le grand bain de l'amour, non sans embûches. "Ma famille l'a accepté tout de suite, sans se poser de questions. La priorité, c'était le fait d'être heureux. Le reste ne compte pas dans ma famille, donc ça s'est très bien passé. De son côté, c'était plus compliqué. Il y avait la séparation, cela faisait 40 ans qu'elle était mariée. Ses enfants voyaient leurs parents se séparer et en plus le fait que je suis plus jeune que certains de ses enfants a posé quelques difficultés, s'est même encore pas tout à fait réglé." Mais l'amour a fini par l'emporter. "Cela fait dix ans, ils ont compris que c'est que c'est concret et sincère et surtout, ils voient que leur maman est beaucoup plus heureuse maintenant." Karine Boutin de conclure : "à partir du moment où les deux sont heureux. Le reste, on s'en fout complètement en fait".
Lily a eu du mal à accepter sa belle-mère. "Il y a eu plusieurs petites péripéties pendant cette relation. J'ai eu un peu un demi-frère avec qui j'ai 20 ans d'écart, donc ce n'est pas toujours facile de s'intégrer. Parfois, je le prends comme mon fils. L'écart n'est pas toujours évident à accepter." Il n'est pas facile de surmonter le traumatisme de la séparation du couple parental, mais "quand les enfants sont grands, on est content pour son parent, c'est tout. L'idée, c'est de ne pas s'immiscer dans la vie de son parent au même titre que le parent n'a pas à s'immiscer dans la vie intime de l'enfant".
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