lundi 15 septembre 2025

Un agriculteur étudie le droit depuis 16 ans afin de poursuivre en justice une entreprise de produits chimiques qui a pollué ses terres

 

Un agriculteur étudie le droit depuis 16 ans afin de poursuivre en justice une entreprise de produits chimiques qui a pollué ses terres

Imaginez un petit village de campagne, encerclé de champs, où l’air que l’on respire n’a plus le goût des saisons mais celui des produits chimiques agricoles. Imaginez aussi un homme, Wang, la soixantaine, modeste paysan, qui décide de dire non. Non à l’injustice, non au silence, non à la pollution qui empoisonne sa vie quotidienne. Ce qu’il ne savait pas encore, c’est que ce « non » allait se transformer en l’un des combats citoyens les plus marquants contre une entreprise industrielle. Et qu’il durerait… seize ans.

Quand la terre se transforme en terrain miné

Tout commence en 2001. Un jour ordinaire, la vie paisible de Wang Enlin et de ses voisins bascule lorsque leurs terres agricoles sont submergées par des eaux troubles. Littéralement. Les eaux usées, pleines de déchets chimiques, débordent d’une usine voisine appartenant à Qihua Group, une entreprise spécialisée dans le traitement de minéraux.

Conséquences ? Des hectares de terres deviennent stériles. Le conseil local lui-même reconnaît que le sol est pollué « pour une longue période ». Pour ces familles rurales, c’est une catastrophe : leurs cultures sont perdues, leur santé menacée, leur futur compromis.

Un combat qui commence avec… un dictionnaire

Face à cette injustice, Wang aurait pu baisser les bras. Mais il choisit une autre voie. Sans formation juridique et avec seulement trois années d’école derrière lui, il se lance dans une mission hors du commun : comprendre la loi.

Avec un vieux dictionnaire comme allié et quelques livres empruntés contre… du maïs (oui, vraiment !), Wang se plonge dans les textes juridiques. Il lit, recopie à la main, compare, apprend. Seize ans durant, il s’instruit seul sur les droits fonciers et la protection de l’environnement en Chine. Ce que d’autres auraient vu comme une montagne infranchissable, il le gravit, patience après patience.

La force du collectif

Mais Wang ne s’arrête pas là. En parallèle de ses recherches, il sensibilise ses voisins. Ensemble, ils prennent conscience de leurs droits et forment une véritable petite communauté de citoyens engagés à faire entendre leur voix.

En 2007, leur histoire attire l’attention du Centre d’assistance juridique aux victimes de la pollution. Des avocats rejoignent la bataille. Et en 2015, après des années d’attente, l’affaire est enfin portée devant le tribunal.

David contre Goliath, version moderne

Le procès oppose donc un village modeste à un géant de l’industrie pesant plusieurs milliards. Et pourtant, à la surprise générale, c’est le village qui gagne ! En première instance, la justice ordonne à Qihua de verser une indemnisation aux victimes, équivalente à environ 110 000 €.

Bien sûr, l’entreprise fait appel. Mais pour Wang, la détermination est intacte. « Même si nous perdons, nous continuerons à nous battre », déclare-t-il, debout, fièrement, dans ses bottes boueuses et sa vieille veste de coton.

Une leçon de courage qui résonne loin

L’histoire de Wang n’est pas seulement celle d’un procès gagné. C’est un symbole de persévérance, un exemple de résilience face aux puissants. Dans un pays où les enjeux écologiques deviennent cruciaux, son combat rappelle que même les voix les plus modestes peuvent faire bouger les lignes.

Et s’il fallait parfois seize ans, un peu de courage et beaucoup d’attachement à sa terre pour faire bouger les choses ?

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